vendredi 25 novembre 2011

Un poke et des piques pour John Pike : Photoshop utilisé pour dénoncer un policier trop violent

  


Réactivité et créativité. La vidéo de l'évacuation musclée des activistes du mouvement Occupy Wall Street d'un campus californien est typique des nouvelles utilisations du web. De son intérêt, de ses richesses mais aussi de ses exagérations et ses dangers...
Il y a sept jours personne ne se souciait de John Pike, aujourd'hui le nom de ce policier est connu dans le monde entier... Cet agent est devenu en l'espace d'une semaine le flic le plus moqué et le plus haï des Etats-Unis. Le symbole d'une violence bête et disproportionnée. Et ce par la seule force de l'image. Plus exactement suite à la diffusion d'une vidéo prise à l'aide d'un téléphone portable.

















Vendredi 21 novembre, un petit groupe de militants se rassemble sur le campus de l'université de Davis. Ils défilent sans violence en hurlant des slogans anti capitalistes. Ils occupent les pelouses et perturbent gentiment le train train du campus. Rien de grave. Au bout de quelque temps, entourés par les forces de l'ordre, ils se lancent dans un "sit-in". Histoire de compliquer leur évacuation, ils s'assoient sur une pelouse au milieu des arbres les uns contre les autres. Rien de très classique. Sauf, quand à bout d'arguments, le lieutenant en charge de la sécurité se met à les asperger à coup de gaz lacrymogène. Le pandore se met nonchalamment, à les arroser à l'aide d'une bombe remplie d'extraits de poivre de Cayenne sensé irriter leurs muqueuses et les forcer à aller respirer ailleurs. Méticuleusement, sans se poser de question, il se met à un mètre des "indignés" et les gaze les uns après les autres en plein visage.
Alertés par les cris de "shame on you", certains étudiants se mettent à filmer la scène avec leurs tablettes ou leur smartphones sous différents angles et la diffusent aussitôt sur le web. Une d'entre elles, sera vue près de 3 millions de fois sur les sites de partage vidéo.





Deux jeunes ont été hospitalisés, huit autres ont du être soignée sur place. L'affaire de cette évacuation musclée aurait pu s'arrêter là. Et comme beaucoup de matraquages passé à l'as. Seulement la disproportion de la réponse policière, le peu de scrupule du lieutenant et surtout sa décontraction ont choqué les internautes.


















Les étudiants de l'université retrouvent une photo de l'agent de sécurité et dénichent sans difficulté son nom et ses coordonnées. De la bombe...



















Le groupe "The Anonymous" qui voit dans ce geste un symbole de la réponse brutale du "système"accepte de  prêter main forte aux étudiants indignés. Le collectif reprend la vidéo, l'habille à sa façon et  y mentionne son numéro de portable, son mail, son adresse. Résultat, en l'espace de quelques heures, John Pike qui croyait s'en tirer sans souci, à peine une petite remontrance, et qui pensait que l'affaire se dégonflerait, devient le flic le plus haï de Californie.



Les télés s'emparent de l'info et dépêchent leurs Poivre d'Arvor faire des plateaux en situation. Le représentant des forces de l'ordre leur répond qu'il se sentait menacé. D'autres vidéos sortent sur les plateformes les plus connues alors pour montrer qu'il n'en était rien. Et le voilà fustigé de plus belle pour son geste outrancier. La toile contre pouvoir et outil de transparence fonctionne à plein. The Washington Post a même parlé à propos de cette réaction rapide de la"culture de la vengeance non violente de l'Internet".



Mais le web  à aussi ses revers. Et on bascule facilement vers la chasse aux sorcières,  le lynchage public. Un message vidéo est ensuite mis en ligne  demandant aux personnes offusquées de passer un coup de fil à ses patrons pour faire part de leur indignation et réclamer son départ. Malgré la tentative de Youtube pour retirer ce film. Trop tard, à son domicile et à ses employeurs, les appels se font nombreux. Le lieutenant est harcelé. Entre autres blagues potaches, des pizzas sont  commandées et facturées en son nom.


Une autre facette plus sympathique de ce buzz est la récupération artistique de cette scène et son son héros. John Pike est devenu bien malgré lui une vedette et une icône.




















Depuis quelques jours, les as de Photoshop ont découpé la silhouette du policier au spray orange et replacé son profil dans des contextes qui n'ont rien à voir. Des images humoristiques qui gazent sur le net. Certains facétieux ont ainsi assimilé l'arme anti léthale du californien à une bombe de peinture. Et imaginer en train de train de corriger les plus grandes toiles de l'histoire. Cela va de Guernica où on le voit au coté de Dora Maar à la Liberté guidant le peuple de Delacroix  en passant par le Déjeuner sur l'herbe de Manet.













Dans un second temps, le lieutenant a été intégré à des clichés célèbres, de grands épisodes de l'histoire ou des photos anciennes. Les internautes l'on ainsi découvert ainsi au coté de Neil Armstrong  sur la lune ou en train de se balader sur un chantier de construction new-yorkais. nombreux sont ceux qui ont voulu une pique ou un Poke à Pike.












































































L'humour absurde est de mise dans ces retouches comme pour exorciser le malaise qu'il y' a voir un officier chargé d'assurer le calme outrepasser ses fonctions d'agent de sécurité.
Grâce au célèbre logiciel de retouches photo, voici le policier en train se s'en prendre à de délicieux héros de bandes dessinées. Un moyen de dénoncer l'utilisation peu appropriée de la violence face à des jeunes qui se voulaient plutôt pacifistes et pacifiques.

























Le gaz propulsé par la bombe étant composé à partir d'agents agressifs contenu dans le poivre de Cayenne, des ingrédients provoquant une fois inhalés toux et irritations, John Pike a été surnommé Pepper spray top. Et les créatifs ont été invité à poster leurs détournements sur le blog Pepersprayingcop.tumblr.com. Les idées originales sont nombreuses.
Plusieurs contributeurs a placé le héros involontaire dans des affiches de cinéma ou dans des scènes célèbres. Le transformant en une star de la toile.
































D'autres ont joué sur son surnom et ont fait le rapprochement avec le titre de la chanson des Beattles, Sergent Pepper, et insérer le profil de l'agent sur le passage piéton de la couverture de la pochette de l'album Abbey Road. Des images singulières qui ne manquent pas de sel et qui se sont répandues comme une trainée de poudre.









Le policier est accusé sur le web d'avoir recouru à la force pour venir à bout de l'expression légitime des "Indignés". Impensable dans un pays où le droit d'expression est érigé en principe constitutionnel et où le premier amendement est considéré comme inviolable. Pour beaucoup, le recours à cette nouvelle technique de dissuasion est injuste. Le dialogue est nié, la répartie impossible et du coup, les plus imaginatifs se sont inspirés de l'imagerie sportive et des grands  combats de boxe. Sans toujours mettre de gants. "Hippie, hippie, hooura"diront ces étudiants dont la démarche rappellent la contestation de la fin des années 60.



























Placé dans des dizaines de situations insolites voire totalement  improbables, le cliché du flic à la bombe au poivre a été repris à toutes les sauces. John Pike est devenu un "mème", un nouveau phénomène, typique de la culture 2.0. Un "même"pour faire simple, c'est une image ou une vidéo, qu'Internet s'approprie et qui devient un phénomène viral.  Une photo reprise en masse, retouchée, détournée, photoshopée à l'infini. Volontaire ou inventaire, c'est quand "même", le stade suprême de la gloire ou de la dérision.




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