dimanche 22 avril 2012

Snow business : une vidéo de glisse qui surfe sur le phénomène des mash-ups



Après la théorie, la pratique. "La critique est Thésée et l'art est Hippolyte" disait Toulouse-Lautrec. Ce n'est pas tout de parler des tendances, de vidéos, de photo à longueur de semaines, à un moment il faut se jeter à l'eau. 
Il y a huit jours, je vous présentais le mash up, sous tous ses différents aspects. Aujourd'hui, je vous propose ma petite contribution. Un mix entre des séquences filmées en mars début avril dns les Hautes-Alpes et les images d'un concert "live" du groupe de rock américain Awolnation. Un hommage aux mélodies d'Aaron Bruno, à sa voix rauque, son énergie. Sail : un titre qui évoque le voyage, les grands espaces, les virées entre amis.

Une idée ( toute proportion gardée) dans la lignée de Human Race des Drunksouls. Un clip frais et dépaysant de Morgane Maçon qui fait le buzz avec  plus de 190 000 vues. Une création qui entremêle des images de "Believe I can Fly" de Seb Montaz Rosset et d'une captation live de la formation emmenée par Djamil Ramdane. Une association riche qui met en valeur le groove des musiciens grâce à la beauté des plans des funambules des cimes. Les claviers, les cuivres du groupe avaient assuré la bande son du réalisateur de Saint-Gervais et conféré cette atmosphère si particulière à son film le plus connu. Ses séquences en plein collent à merveille sur les mélodies punk rock. Un jeu de ping pong heureux... Gagnant gagnant.

samedi 14 avril 2012

Les mash-ups, des pots-pourris pour rire ou pour rêver




"Welcome on earth." Bienvenue sur Terre. C'est la vidéo du moment. Un clip qui met en avant les beautés et les joies de la vie sur Terre. Des images sublimes et un montage rythmé à partir d'éléments hétéroclites pris à droite et à gauche. Plus d'un million de vues et ce n'est qu'un début. C'est l'illustration d'une tendance forte du moment sur le web : le mash-up, autrement dit le montage et le détournement d'images, de musiques, de dessins animés, bref d'ingrédients qui en principe n'ont rien à voir les uns avec les autres mais qui mis bout à bout prennent une autre dimension.

En l'occurrence, avec cette compilation d'images HD montées sur "Lights", la jolie mélodie d'Ellie Goulding, l'accent à été mis sur la nature, l'adrénaline et les sports de glisse. Mais cet exercice peut très bien  être réalisé avec des extraits de films, de concerts, de série télévisés, des brides d'émissions télé ou des captures d'écrans de jeux vidéos. Le dernier en date réalisé par Alexis D'Anna mélange les bandes annonce de Cloclo et de Drive. Gros buzz pour un clin d'oeil monté le 27 mars dernier à l'arrache sur un coup de tête à deux heures du matin.



"Famous movies with cats", l'autre création à succès de ces dernières semaines fait se télescoper des scènes mythiques du cinéma et de courtes vidéos de chats filmés dans des situations improbables. Surfant sur le phénomène des lol cats, ces petits films qui font fureur sur la toile où l'on voit des chatons dégringoler des chaises ou jouer avec des pelotes de laine l'air malicieux, ce petit délire posté le 29 mars sur You tube a déjà été vu 300 000 fois. Faut dire que ce pot-pourri pour rire réunit nombre de dialogues qui font le délice des cinéphiles : Taxi Driver, Scarface, Casablanca, Seven, "2001, l'Odyssée de l'espace"...



Au départ, le mash-up, parfois surnommé bootleg, est un terme utilisé en musique, une pratique qui consistait à mixer dans un même morceau les pistes de plusieurs titres existants.  Et à en faire une bonne purée (mashed potatoes en français). Avec Internet et le développement des plates-forme de partage en ligne, les cordons-bleus, pros d'Avid ou de Finalcut ont pu ajouter crème fraîche et fromage, vidéos et bruitage. Démonstration avec  Miss Sue Teller, une grand-mère tellement déjantée que certains disent qu'elle est saoule Teller.


Aujourd'hui, les tables de mixage, les ordinateurs ont remplacé les platines et en soirée les DJ se régalent à passer d'un tube à l'autre. Avec plus ou moins de dextérité. Les plus doués pouvant ainsi mixer une dizaine de titres en même temps. A l'image de Hugo Leclerc, petit prodige de l'électro pop. 17 ans à peine et déjà star qui a réussi l'an dernier un mix avec 39 titres et non des moindres puisqu'on retrouvait Goota Feeling des Black Eyed Peas, qe Baby One more time de Britney Spears, Aerodynamic de Daft Punk, Mister Blue Sky de ELO ou Hung up de Madonna. Une play list branchée plutôt agréable résumée avec talent en moins de quatre minutes, 3 minutes 25 pour être précis. Une belle prestation qui a valu à son auteur surnommé Madeon une énorme notoriété, la vidéo de son mix comptabilisant plus de 10 millions 400 000 vues sur You tube.



Avec YouTube, Dailymotion et les autres comme terrains de jeu, l’art du mash-up vidéo connaît aujourd’hui son âge d’or. Depuis quelques années (YouTube et Dailymotion datent seulement de 2005), les internautes ont commencé à découper des séquences vidéo, triturer des bandes sons, bidouiller des raccords. Ils réalisent des play-lists idéales. Et chaque fin d'année, depuis deux ou trois ans, certains accros montent ainsi le best of de l'année en musique où l'on peut revoir les passages les plus marquants des clips qui ont défrayé la chronique au cours des douze derniers mois. Le Top of the pops 2001 de BenStiller, artiste d'origine allemande reprend ainsi Hangover de Taio Cruz, Party Rock Anthem de LMFAO ou Rolling in the deep d'Adèle.




Les mash-ups sont légion sur la toile. Un des plus célèbres et un des plus vieux étant le remix de titres ultra connus des Pussycat Dolls et de Michael Jackson. Deux clips assemblés avec talent, très fluide où l'on glisse de l'un à l'autre sans problème...


  

Parfois émouvants, ces medley témoignent souvent d'une grande culture musicale. Et les Anglo-saxons sont champions dès qu'il faut se souvenir des standards de la pop. En France, les créateurs sont plus facétieux. Ils brillent moins par leur connaissance que leur virtuosité au clavier et leur envie de délirer. Ce qui donne des ovnis et des perles à pouffer de rire. La French touch est placée sous le signe de l'humour et ces dernières années. On a vu apparaître sur les sites français pléthore de détournements cocasses, mettant des images de concerts sur des musiques qui n'ont rien à voir. Des parodies hilarantes.



L'école française superpose des interprétations qui n'ont rien à voir entre elles, en mettant de la variété sur des captations de hard rock où en faisant jouer des titres punk rocks à des artistes connus dans d'autres registres.



Plus la ficelle est grosse, plus le titre est populaire, plus cela marche. C'est efficace, cela fait sourire mais cela demande un art consommé du montage pour éviter les contre-temps, les raccords douteux. Il faut savoir utiliser à bon escient les plans de coupe, les plans de dos, les plans larges, les plans de grue sur la foule quand, de toute évidence, les artistes ne sont pas dans le rythme. Bref savoir remonter intelligemment.



Tout l'art est dans le décalage et la distance entre l'air de départ et l'image de l'artiste choisi pour la vidéo. Francky Vincent interprété par Indochine, Jean-Luc Lahaye par les Scorpions, Pierre Billon par Kurt Kobain, La Compagnie Créole par Kiss, Les Inconnus par les guns n'Roses. Si les univers s'opposent, les raccords sont réussis, l'effet est garanti.



Popularisée par le monde musical, la mode du mash-up a gagné d'autres univers comme ceux des jeux vidéos, des séries télévisées ou du cinéma. Soit pour rendre hommage, soit pour faire rire. Le mélange des genres donnent souvent un sens différent à une séquence vidéo. 
Les mêmes images ne produisent pas les mêmes effets selon que l'on met la BO d'origine ou une mélodie plus farfelue. Exemple avec le délicieux Mary Poppins transformé en film d'horreur juste par l'ajout de bruitage gore ou effrayant. L'utilisation de la bande originale du film "An American Hauting" composée par Caine Davidson  et de quelques sons bien choisis métamorphosent la petite fable de Disney en cauchemar.



Faute de pouvoir reprendre les images de chefs d'oeuvre du septième art, eu égard aux doits et la difficulté de digitaliser des longs formats, les monteurs préfèrent souvent piocher dans les bandes annonces. Le carambolage entre deux films cultes avec la dramatisation et les slogans marketing qui sont de mise dans les trailers est parfois surprenant. Comme la rencontre entre Pulp fiction et Star wars.



Les séries TVne sont pas en reste... Star Trek revu et corrigé façon Brokeback Moutain est tout de suite plus glamour. On n' ose imagine ce que cela aurait donner avec la Petite Maison dans la prairie.



Parmi les inserts les plus utilisés, ceux qui tiennent le haut du pavé sont incontestablement : Star trek, Kill bill, Borat, Pulp fiction, Scary Movie, Requiem for a dream, Broke back moutain et ses situations ambiguës et le plus récent Drive. Parodie. Parodie. Ces exercices de style sont des bonnes récréations pour les as du clavier et de la souris. Seuls le sens du rythme et le respect des règles de montage peuvent faire passer les scénarios les plus absurdes. 



Ludiques, créatifs, la profusion de ces oeuvres qui sont souvent des clins d'oeil, des hommages d'amateurs. Bien polies, ces idées originales, cette discipline "so 2010" s'apparentent à de l'art. Et signe des temps, la matière première provient du net. Et c'est là où le bat blesse. Question droit d'auteurs, ce n'est pas génial, génial. Les artistes qui se sont donnés du mal à faire de belles images ou imaginer des mélodies efficaces à la sueur de leur front ont du mal à accepter qu'on puisse dans leurs créations sans leur demander d'autorisation. Mais ils ne peuvent pas courir après tous ceux qui s'en emparent discrètement car ce serait un combat sans fin. Parfois contre des fantômes.
Pour une diffusion entre amis, ou sur le net, tant que cela ne porte pas atteinte à la notoriété de l'oeuvre de base, il n'y a pas de quoi fouetter un chat. Le seul risque pour ceux qui s'adonnent à ces pot-pourris est de voir retirer leurs créations des sites de partage. 
Mais le débat est là. Le même qui anime en Europe, les pro et les anti Hadopi, les pro ACTA, soucieux de faire respecter voire d'élargir le droit sur la propriété intellectuelle et les anti, souvent jeunes, qui prônent la liberté d'expression sur la toile avançant que de tout temps on a revisité, réinterprété les oeuvres du passé. Avec le remix musical et vidéo, la notion de copyright est un peu malmenée surtout quand on multiplie les sources d'inspiration et les emprunts dans une même oeuvre. Peut-on encore parler d'oeuvre originale? C'est un terrain mouvant et les responsables politiques ne sont pas tous sur la même longueur d'ondes. Viviane Reding la commissaire européenne chargé de la justice et des libertés publiques serait plutôt laxiste au vu des multiples manifestations d'internautes qui sont descendus dans la rue, les chefs d'Etat des 27 et leurs ministres bien briefés par les majors du cinéma et des maisons de disques sont sur une position plus répressives. Pour combien de temps encore? Purée, difficile à dire.

dimanche 1 avril 2012

Le tilt shift, un effet qui fait tilt ! Un petit plus pour vos photos et vos vidéos.



"Bonsaï Burma". C'est la vidéo "voyage" du moment. Une carte postale de Birmanie. Mise en ligne fin février, ce clip sur le premier concerto pour piano de Tchaïckovski a rencontré un très beau succès. Et pour cause, son réalisateur, Joerg Daiber a su saisir à merveille toute la beauté de ces temples et l'atmosphère magique de ses paysages. Il a filmé avec son Lumix GH 2 la vie sur ses marchés, la douceur des rives de ses fleuves et l'ambiance des rues en time lapse. Et monté ses séquences sur Final Cut après être passé par After Effects. 
A l'arrivée : de très belles images avec une faible profondeur de champ qui nous montrent les plus beaux coins de Bagan, Mandalay ou Rangoon. On en prend plein les yeux et on s'émerveille devant ses plans où les trains ont l'air de maquettes, où les passants ressemblent à de petits soldats de plomb. Le résultat d' un effet utilisé de plus en plus régulièrement depuis deux ans : le tilt shift. Une mode qui est en train de prendre puisque la plupart des films qui ont fait le buzz ces dernières semaines y ont recours. A l'image du  célèbre "The City of samba"consacré à Rio qui a été retweeté des centaines de milliers de fois.



"La cité de la samba", tourné lors du Carnaval en 2011 et diffusé en février pour annoncer la nouvelle parade de cette année, une perle de Keith Loutit et Jarbas Agnelli deux adeptes du tilt shift qui ont même monté une boite de production spécialisée dans les Small Worlds Projects. Deux pionniers qui se sont passionnés par cette technique qui transforme une foule en collection de petits bonhommes en plomb et une gare en circuit miniature. 


Toute la beauté de ce procédé vient du travail sur les perspectives, la profondeur de champ et la différence de netteté entre les différentes parties d'un même plan.  Pour faire simple : lorsqu'on fait un point très précis sur  une scène et on rend flou son arrière plan ou ses contours, on valorise l'objet placé au centre. Par contraste, celui ci apparaît encore plus net et on a plaisir à l'observer en détails.


Prisé par les réalisateurs en quête de plans larges originaux pour leurs projets personnels, le tilt shift a été repris à la télévision ( certains effets de transition de la rubrique du "Chateau" de Dimanche + sur canal, ont été tournés avec un 5D doté d'un objet spécial ).
La publicité, elle aussi, en a très vite vu tous les avantages. Cette semaine, un célèbre créateur de jeux vidéos a mis en ligne une campagne virale très remarquée pour la sortie de son nouvel opus "Grand Thief Auto IV" mêlant animation et tilt shift.
C'est une tendance de fond comme en témoigne ce spot par Aurora Lab pour promouvoir les énergies renouvelables que j'avais signalé sur LCP  en janvier 2011 et qui fait aujourd'hui figure de référence.



Pour parvenir à de tels résultats, le plus simple est d'utiliser un objectif à décentrement. Un objectif plus onéreux qu'on peut louer à la journée et placer sur son boitier ou sa caméra. Légèrement bombé, il permet d'avoir un point très fin avec des contours flous. Au début, ce genre d'objectif était utilisé par les photographes d'architecture pour corriger les problèmes de perspective et de lignes lorsqu'il prenaient des clichés de monuments.



Difficile à manier, car nécessitant une mise au point très juste, et hors contexte, il donnaient des photos aux bords flous. Pour certains, c'était une source d'erreurs. d'autres y on vu un terrain à explorer et ont joué avec. Avec succès. L'effet hyper réaliste étonnant, on a ainsi vu se multiplier les paysages avec une très faible profondeur de champ dans les expositions. De quoi épater la galerie. A tel point que la technique est devenu un classique. 
Avec la généralisation des appareils "deux en un", capables de faire aussi bien de la photo que de la vidéo, l'astuce a gagné le monde des vidéastes.  Pour ceux que la méthode intéresse. Explications.



Faute de savoir utiliser cet objectif qui demande un opérateur expérimenté ou de pouvoir en acheter un, certains aficionados se sont mis à imiter son rendu de manière artificielle en employant des logiciels de retouche. Soit avec photoshop en enlevant un peu de clarté et en floutant les bords de leur photo soit en montage en mettant un effet blur, "flou", sur le bord de leurs séquences.  Quite à perdre un peu de cadre. Un truc ingénieux mais qui ne trompe pas un oeil avisé puisque ces astuces ne peuvent pas reproduire le rendu progressif d'un objectif à décentrement bombé. Et ce n'est pas en dégradant une image que l'on peut concurencer la qualité de photos shootées avec un bel objectif...



Quoiqu'il en soit de nombreux outils sont apparus comme Tilt Shift Générator qui mâchent le travail pour les amateurs et qui permettent même de créer des effets maquettes sur des plans macros et non plus seulement sur des paysages...


En moins d'un an, le réflexe, si je peux dire, à été pris par les photographes et certaines marques comme Nikon ont déjà intégré ce trucage dans les gammes d'effets à leurs boitiers semi pro pour que les amateurs s'y essayent. A l'autre bout de la chaîne, sur les applications d'échanges et de retouche photo pour smartphones sur Tadaa ou Instagram, on peut choisir d'apposer sur un cliché un filtre qui flotte les contours des photos. On peut ainsi jouer sur la forme du pourtour flou et choisir la largeur de la partie nette.





Le tilt shift est tendance. Utilisé à mauvais escient et mal réalisé, il va peut être finir par lasser. Repris par des réalisateurs de génie, il n' a pas fini de nous faire rêver. L'exemple  de cette pub particulièrement bien faîte pour Réseau ferré de France, une entreprise peu connue chargée d'entretenir les infrastructures ferroviaires est édifiant. En mélangeant des  paysages réels filmés avec un objectif à décentrement, des maquettes, des animations 3 D et en variant les valeurs de plans, Thierry Poiraud nous perd et nous transporte. Comme quoi "Small is beautiful".  

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