mardi 29 mai 2012

"Off the grid", une magnifique aventure photographique et humaine d'Eric Valli. Welcome "Into the wild", avec ceux qui ont tout quitté pour fuir le système




"Into the wild". Ils ont tout quitté.  Ils ont fui la société de consommation. Ils sont partis loin. Loin des villes, loin de la pollution, loin du sytème. Loin de tout. Sans rien.


Les "Robinsons" photographiés par Eric Valli ne sont pas sans ressembler à Christopher McCandless, le héros du film de Sean Penn. Comme lui, John, Lynx, Tod et les autres ont dit au revoir à une existence confortable pour vivre en harmonie. Avec eux-mêmes et avec la nature.
 Sa dernière série "Off the grid"  retrace des parcours atypiques. Ces photos sont reprises en partie dans son livre "Rencontres hors du temps : ils ont choisi de vivre libres". "In nature, one find oneself". 

Eric Valli est  voyageur insatiable. Photographe, réalisateur, il s'est fait connaitre avec son travail sur le Népal et le Tibet et des séries de photos cultes , "Chasseurs de miel", "Chasseurs des ténèbres" et surtout un long métrage tourné en pleine montagne "Himalaya, l'enfance d'un chef". 
"La vie dit-il a toujours été plus généreuse et plus inventive que tout ce que j'aurais pu imaginer. Il suffit de s'y jeter."



Pendant deux ans, il a parcouru les Etats-unis avec son Leica et rencontrer des personnages qui ont choisi de vivre "léger, sans contrainte".  Des rêveurs qui ont sauté le pas et qui ont dit adieu à la télévision, aux téléphones, aux impôts... Off the grid, est une galerie de portraits d'êtres sensibles pleinement conscients des contradictions du monde actuel et vivant presque dans le plus profond dénuement.  Ils ont dit  "non" au système. Ils ont fait le pari de la rupture, et à les croire, s'en portent très bien. Ils sont chasseurs, trappeurs, fermiers à l'ancienne, mais la majorité d'entre eux vit en se contentant simplement de "moins", tout en cherchant le "mieux" à savoir l'acte le plus durable et le plus responsable. 



Le cas de John est emblématique de cette génération qui s'est levé et a dit stop. Il avait "tout" pour lui, riche patron, il a fait fortune dans les assurances. Il possédait une superbe maison, deux voitures, vivait avec une femme charmante. La parfaite incarnation du rêve américain. Sans aucun souci matériel. t au milieu des marais dans le Sud des Etats-Unis. Un jour après une nuit passée à boire du gin tonic. Il se réveille au bord de sa piscine. Effaré, il contemple son succès, sa maison, ses voitures. Il est atterré. Sa vi effrénée, le travail, le fric, plus rien n' de sesns pour lui. Il sit qu'il exploite ses clients car les taux d'assurance sont prohibitifs. Il connait les petites clauses qui , au moment crucial ressortirent. : "Oui, mais voyez-vous là…". En plus ce ne sera pas lui qui aura à le dire, mais quelqu'un d'autre, dans un autre bureau, dans une autre ville. John ne peut plus accepter ces mensonges, ces compromissions, ces magouilles, sa vie.



Il change son rythme de travail.  Six mois dans l'année, il continue son job avec costume et grosses cylindrée et le reste du temps il s'évade dans les endroits les plus reculés, pour trouver un lieu propice à ses désirs de pureté. Puis un jour après une dizaine d'années à vivre cette vie de schizophrène, il décide de rompre avec la société. il se rend dans le bureau de son patron et lui récite en guise de démission un célèbre poème de Robert W Service, un texte qui allait bien des années plus tard servir d'introduction au film de Sean Penn, Into The wild. 

"Il existe le plaisir des forêts encore vierges,
Il existe l'enchantement de la grève déserte
Il existe un monde qu'aucun homme n'a foulé
Ce sont les rives de l'océan qui nous berce de mélopées
Je ne méprise pas mes hommes mais je préfère la nature…"


Il laisse l'essentiel de ce qu'il possède à sa femme : "She got the house, I got the freedom". Avec ses economies, il s' achète un lopin de terre contingu à deux milles hectares de marais et part vivre en quasi hermite dans des cabanes sur pilotis… 
Pour ce magicien de la finance, la nature est puzzle écrit Aurélie Taupin qui a aidé Eric Valli à rédiger son livre. " En regardant, en observant, il assemble les pièces et comprend la vie autour de lui. "C'est comme apprendre à se servir dun ordinateur. au débaut c'est un peu affolant, jusqu'au omet où tout bascule… Désormais, je sui ss i affuté que je peux sentir l'harmonie ou l'inconfort de la forêt dans son ensemble, comme de chaque arbe en particulier. "
Celui qui a vécu sur l'or se contente à présent de cinq mille dollars par an. Il vit de la vente de ses peaux de castor, de raton laveur ou de loutre et de menus travaux de bricolage pour ses voisins…


Eric Valli raconte qu'un matin assis sous l'auvent, il aperçoit que sa chaise est faite de cravates tressées vestiges de son ancienne vie. et alors hon de lui présenter l'objet sur lequel il prend son déjeuner le matin et notamment une cravate bleue avec un taureau et un ours rouge. "Les deux animaux qui se font face, c'est le symbole de Wall street? Ils représentent le flux des capitaux, le combat des forces boursières." 



 Tod et Talia vivent dans les Appalaches, un choix radical. Une vie, seuls en montagne, passée à cueillir des plantes domestiques, construire des cabanes, scier du bois pour le chauffage, tanner des peaux et lire au coin du feu.
Brillant ingénieur et sensible à la protection de l'environnement, Tod  s'était spécialisée dans les énergies propres et renouvelables à l'université de Davis en Californie. Il travaillait à la conception de batteries pour les moteurs hybrides. Jusqu' au jour  où il réalise que dans son laboratoire, il passe son respirer des produits chimiques. "Là j'ai pensé , minute, ! tu veux créer un monde propre, avec des produits terriblements nocifs, c'est totalement stupide. c'est combattre le feu avec le feu. c'est essayer de sauver la nature en créant plus de pollution. C'est de la foutaise." 
Il plaque tout. Avec sa compagne, Talia. 
"Après avoir perdu la foi en la technologie, nous avions le choix : 
-continuer comme avant : nous dire que de toute façon, nous ne pouvions rien y faire. Aller à mon boulot en attendant le vendredi soir, fumer des joints et boire de l'alcool pour noyer ce sentiment de culpabilité, de tristesse et de colère. C'était la première option !
- Devenir activiste ( ce que j'ai fait pendant deux ans) , combattre pour une cause juste. Mais, encore une fois, si je j'utilise des ordinateurs, de l'électricité, et prends l'avion, - ce qui est nécessaire pour être efficace-, je contribue à la destruction, à l'exploitation de la nature contre lesquelles je me bats.
- Ou alors, troisième solution, celle que nous avons choisie, devenir le plus indépendants possible du système."
Tod avait soif d'apprendre. Aujourd'hui, il passe ses jours  à comprendre comment mieux vivre au milieu des arbres, des animaux, des vents. Une école de patience et d'humilité.



Mais la plus étonnante de ces rencontres est celle de Lise, une belle femme de 43 ans, blonde et charismatique. Qui a fait le choix de la décroissance au point de vivre sans rien d'autre que les ressources de la forêt, dans une simplicité proche de celle des hommes préhistoriques… Jeune, cette ancienne punk, suédoise par sa mère et anglaise par son père, vivait une existence "sex drug and rock'n roll" une vie entre Londres et Amsterdam. Un rythme un peu suicidaire entre squats, paradis artificiel et histoire de coeur éphémères.  Aujourd'hui, elle est dans son élément, équilibrée et apaisée au fond de la forêt dans les Rocheuses. Seule avec ses deux chevaux.  "La moitié de la population vit en ville. La nature n'est jamais prise ne compte… On pille ses ressources, on y jette nos déchets. On prétend l'aimer mais si c'était vrai on ne la traiterait pas ainsi. "Cette déconnexion, cette vie entre béton, macadam et néons, nous durcit et nous fait perdre nos repères."


Lise surnommée Lynx : je veux vivre le plus léger possible, ne pas laisser de trace aussi impalpable que la brise…  Fort de son expérience, elle a fondée son école le Four Seasons Préhistoric Projects, où elle anime des stages de survie à des adeptes du retour à la nature.
Eric Valli a suivi cette formation extrême un sort temps… Il s'est investi corps et âme. 
Pendant trois semaines, il a partagé la vie de ses naufragés volontaires, faisant le feu avec des silex, se nourrissant de racines, de fruits et de fourmis, s'habillant avec les peaux des animaux chassés par le groupe, les mocassins qu'il s'est cousu lui mêmes. Auprès de cette coach un peu particulière, le photographe revient à l'essentiel. "Si nous devions tuer et découper la viande que nous avons envie de manger, lui dit Lynx, si nous devions abattre et débiter le bois dont nous avons besoin, nous serions plus responsables, plus frugaux, en voyant et en comprenant, au plus profond de nous, l'impact, la gravité de ce que nous faisons."




Dans la nature, il prend conscience de certaines choses enfouies un peu vite dans notre mémoire. "Si nous dépensons plus d'énergie à chercher notre nourriture qu'elle ne nous en apporte, à court ou à long terme, c'est la mort. Au travers cette expérience, j'ai découvert ces choses basiques, que les circuits de distribution et supermarchés nous ont fait oublier. Ce n'est pas une découverte intellectuelle : nous sommes ici en contact direct et total avec notre réalité d'être humain.- que dis-je - d'être vivant. Ici, il n'y a rien de  théorique, de livresque. Non, la réalité te mord aux tripes." 


Curieuse aventure. Eric Valli s'aperçoit que revêtu de peaux de bêtes, c'est la sienne qu'il risque. Et perçoit des paradoxes, il vit comme un Robinson coupé du monde… Hormis le bruit des 747 qui passent six fois par jour au dessus de sa tête. Un grand écart qui lui ouvre encore plus les yeux sur la dérive de nos sociétés  qui cherchent le toujours plus, quitte à aller encore plus vite droit dans le mur… Avec le feu en guise de télévision, il s'interroge alors sur nos faux besoins créés de toute pièce par des chefs de bureau marketing, sur cette course folle à la croissance… sur notre planète aux ressources limitées. Et qui s'amenuisent alors que la population ne cesse de s'accroître. 


Sa série de photos, son livre témoignent de son cheminement… Pendant deux ans, physique et intellectuel. Et il nous livre ses réflexions, ses doutes face aux remarques de ces rebelles. Il admire leur parcours et prête l'oreille à leur discours sur la crise qui ne fait que s'accroitre, les ressources naturelles qui se réduisent alors que nos désirs gonflent artificiellement, la démographie galopante, les tensions inexorables entre les nantis et les pauvres, la montée du terrorisme et les guerres… Et notre aveuglement. notre surdité. 



Il les écoute. Mais sans tomber dans la fascination. Relevant chez les autres une certaine naïveté, chez les autres une volonté de fuir et de retomber en enfance. Constatant parfois des contradictions. Il en sourit parfois comme lorsqu'il voit les stratagèmes de Tod et Talia pour récupérer de la nourriture, des yaourts, de l'huile, du riz ou de la farine, des fruits dont la date de péremption est passée mais qui sont encore consommables à l'arrière des supermarchés dans des bennes métalliques ou des madriers jetés après avoir servir à protéger du matériel. Il en sourit mais tout en comprenant leur démarche lorsqu'il dénonce un monde qui marche sur la tête.  Aux Etats-Unis, 40 % de la nourriture est mise à la poubelle . "Imagine, lui dit "Tod, cette nourriture qui a été plantée, récoltée, transportée, transformée, empaquetée, retransportée pour être finalement jetée. Des millions de gens ont participé à son élaboration partout sur la planète, du fermier au fabricant d'engrais, au vendeur du supermarché et même jusqu' à ceux qui recyclent, détruisent ou enterrent ce surplus." Pour rien ou presque.  En pure perte. A part pour les magasins qui déduisent ces pertes de leurs impôts. Se contente-t-il d'ajouter. 


Off the grid, hors des réseaux, du système pourrait-on traduire. Un beau travail photographique d'Eric Valli sur des hommes et des femmes certes à part mais qui nous ressemblent et questionnent en nous notre part d'humanité. Au prix d'un engagement physique et psychologique pour tenter comprendre ces démarches atypiques. Une série de photos à retrouver sur son site, ainsi que d'autres comme Gentside ou Lense qui depuis deux semaines font le buzz sur ses clichés.  Mais surtout un livre riche tout en nuances paru en novembre  2011 aux Editions de La Martinière. Et un documentaire diffusé sur Canal Plus sur les traces de Lynx et de ses compagnons,  "survivants" volontaires. 




Eric Valli ne fait pas partie de ces photographes qui disent "bonjour, je viens prendre des photos, ne vous occupez pas de moi, je vous pose deux trois questions, je repars et j'essaye de vous faire parvenir la publication", Non, il respecte ceux qu'il filme et ceux qui photographie et c'est pourquoi, il se plonge dans un univers. In the deep, "into the wild". Pour leur être fidèle et être fidèle à ses convictions. 









2 commentaires:

  1. J m inspired. It s my dream. Where can J m living? J m french.

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  2. Be inspired, Martine. Life is beautiful. Vous aussi vous êtes forte et talentueuse, un exemple de vie en contact avec la nature.

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